Page:Poésies de Schiller.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

son fiancé. Je te laisse près de lui pour otage jusqu’à ce que je revienne te délivrer. »

Son ami fidèle l’embrasse en silence et se remet entre les mains du tyran. L’autre part ; avant le troisième jour il a marié sa sœur, et il se remet en route à la hâte, inquiet d’arriver trop tard.

Cependant il tombe des torrents de pluie, les sources d’eau se précipitent du sommet des montagnes, enflent les rivières, et lorsqu’il arrive, son bâton à la main, au bord d’un ruisseau, l’onde fougueuse ébranle le pont et renverse les arches qui s’écroulent avec le fracas du tonnerre.

Il erre désespéré sur le rivage, regardant de tous côtés s’il ne voit point de nacelle, et appelant à haute voix le secours d’un batelier ; mais personne ne vient à lui, et le torrent sauvage s’étend au loin comme une mer.

Alors il tombe sur le rivage, élève les mains vers Jupiter, pleure et s’écrie : « Oh ! arrête l’impétuosité de cette onde. Le temps vole, le soleil est déjà arrivé au milieu de sa course, et lorsqu’il se penchera à l’horizon, si je n’ai pas atteint la ville, mon ami doit mourir. »

Mais la fureur de l’onde s’accroît sans cesse : les vagues bondissent sur les vagues : les heures rapides se succèdent. Dans son angoisse, Moros se décide à