Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/37

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ment, qu’en récompense de ce que j’avais fait pour calmer ses craintes, elle veillerait sur moi, dès que son âme aurait pris son vol, et m’apparaîtrait durant mes veilles nocturnes, si de telles visites ne lui étaient pas interdites. Si la liberté laissée aux élus du paradis ne lui permettait pas d’accomplir cette dernière promesse, elle pourrait toujours, ajoutait-elle, m’annoncer sa présence en m’envoyant ses soupirs dans la brise du soir ou en imprégnant l’air que je respirerais des parfums qu’exhalent les encensoirs des anges. Avec ces paroles sur les lèvres, elle rendit son âme innocente, et sa mort vint mettre un terme à la première période de mon existence.

Jusqu’ici j’ai tout raconté avec une vérité scrupuleuse. Mais dès que je franchis la barrière que la perte de ma bien-aimée forma dans le sentier de ma vie pour aborder les événements survenus au delà, je sens l’ombre s’amasser autour de mon cerveau et je doute que mon récit soit celui d’un homme ayant la plénitude de sa raison. Mais souffrez que je le poursuive. Pour moi les années se traînèrent lourdement et je continuai à vivre dans la Vallée-aux-Herbes-Multicolores, où tout avait subi une nouvelle transformation. Les fleurs en forme d’étoiles, rentrées dans les tiges des arbres, ne se montrèrent plus. Les couleurs du tapis de