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LES NOUVEAUX TANKS

depuis notre offensive. De là, nous nous rendons à Chalais-Meudon, où nous voyons fonctionner dans le parc une quinzaine de tanks. Ils montent et descendent les pentes les plus raides, passent dans les bois, écrasent les arbres, renversent des pans de murs. Les uns sont armés de mitrailleuses, les autres de canons. Le général Estienne trouve qu’ils ne sont pas encore tout à fait au point. M. Renault affirme, au contraire, que les modifications demandées seront terminées demain. Estienne répond qu’en tout cas il faudra que les hommes qu’il a préparés à Cercottes fassent des essais de tir avant de partir pour le front. Loucheur insiste pour que le départ soit immédiat et se déclare d’accord avec Pétain sur ce point. On croit, en effet, aux armées, que l’occasion actuelle ne se retrouvera peut-être pas avant longtemps.

Pendant mon absence, Clemenceau est venu à l’Élysée et a vu Sainsère. Il lui a annoncé qu’il partait demain, de nouveau, pour le front avec Winston Churchill, qu’il allait tâcher de régler la question relative à l’autorité du général Foch. Il a déclaré que, cette fois, il ne me demanderait pas de l’accompagner, parce qu’il n’était pas sûr que la réunion aboutît à un résultat satisfaisant et qu’il valait mieux, à son avis, me réserver pour servir d’arbitre. Est-ce sincère ? Ou le gêné-je ? Je ne sais.

Mais en un instant, tout est changé. Voici Sainsère qui introduit Clemenceau et celui-ci m’apprend qu’il retourne effectivement au front demain, non pas avec W. Churchill, qui rentre en Angleterre, mais seul, pour rencontrer Lloyd George à Beauvais. « Je ne suis pas, me dit-il, content de Foch, ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que je songe à le changer ; mais il aurait dû régler plus vite cette question du secteur de