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LA CAMPAGNE PACIFISTE EN DÉCROISSANCE

voyez à quel point ils sont embarrassés. » Clemenceau reprend : « Vous avez vu l’acquittement de Denvignes et de Lévis-Mirepoix. — Je l’avais prévu et je vous l’ai dit. — Oh ! sans Leygues et sans Marsal qui ont déposé de manière à les défendre, ils auraient été condamnés. En tout cas, je conserve mes droits disciplinaires. Je vais infliger à Denvignes des arrêts de forteresse et le renvoyer au front. Je ne suis pas méchant ; je ne veux pas lui faire de mal, mais je veux affirmer mes droits. Autre chose : Ne vous tourmentez pas de la campagne pacifiste ; elle est en décroissance ; il n’y a rien à craindre. Je laisse de côté quelques commérages de salon ou les sottises imaginées par le snobisme de Briand. Tout cela ne compte pas. Mais dans les milieux ouvriers l’amélioration est certaine. Tous ces gens reviennent à moi peu à peu parce qu’ils voient que je fais la guerre. Je vous le répète : il n’y a rien à craindre. » Je lui réponds que je ne puis partager son optimisme. Je lui signale un mot de Busson-Billault à Millerand à propos de l’affaire Sixte : « N’aurait-on pas laissé échapper une occasion ? » Je lui signale les articles de la Vérité ; il me répète : « Il n’y a rien à craindre. » Il me dit ensuite que notre ministre de France en Hollande, Allizé, a été saisi d’une offre de la Volkszeitung qui consentirait, pour un million de marks, à faire une campagne en faveur de l’indépendance de la Belgique et qui même mettrait sur le tapis la question d’Alsace-Lorraine. Clemenceau songe à envoyer en Hollande Marc Réville qui parle le hollandais, pour traiter cette affaire. Puis il me raconte que Pershing est allé à Londres pour mettre ses troupes à la disposition des Anglais. Clemenceau a prié Foch de lui faire un travail sur la nécessité de conserver le contact entre les troupes américaines et les troupes françaises. Au besoin, il irait à