Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 10, 1933.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
ARRESTATION DE CAILLAUX

frement de Bernsdorf disant que l’agent allemand de la Havane annonce le départ du paquebot qui portait Caillaux, recommandant qu’en cas de torpillage on traitât Caillaux avec égards, mais sans ostentation.

Clemenceau sort et dans le cabinet de Sainsère rencontre Mme  Meyer, veuve de l’Alsacien fusillé par les Allemands à Mulhouse. Alors, très ému, les larmes coulant de ses yeux, il s’approche d’elle, lui prend les mains, les serre toutes deux très fortement, approche Mme  Meyer de sa poitrine, et ne trouve pas un mot à dire. Elle, très troublée aussi, murmure simplement : « Oh ! monsieur le président, vous nous rendrez à la France, n’est-ce pas ? Oui, oui, madame, » répond Clemenceau, et il s’éloigne, profondément remué.

L’après-midi, Pams vient, très aimable, causer avec moi. Il s’excuse de ne m’avoir pas rendu visite ces jours-ci. Il a été, dit-il, très occupé par les mouvements ouvriers. Il y a des grèves à Lyon et il en redoutait la généralisation. Il se loue beaucoup de l’action de Jouhaux, et même, dit-il, de Merrheim qui a prêté son concours à Loucheur. Il est encore arrêté dans ses projets de nominations préfectorales par les exigences des députés, qui entendent tous choisir eux-mêmes leurs préfets. Pams dit que dans Paris les gens s’interpellent joyeusement, même sans se connaître et crient à propos de Caillaux : « Il est arrêté ! »


Mardi 15 janvier.

Longue conversation avec Bernardino Machado, président déchu du Portugal. Il désirerait que les Alliés intervinssent auprès du gouvernement révolutionnaire du Portugal en faveur des anciens ministres emprisonnés.

Renaudel rapporte ce matin dans l’Humanité un bruit répandu, paraît-il, par Caillaux. Il y