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LES PRÉTENDUS CONSPIRATEURS

taire. Je ne lui ai pas dit qu’elle me réjouissait. Mais je ne lui ai donné aucune arme ni contre vous, ni contre Pétain.

— Je sais très bien que vous ne l’auriez pas fait volontairement.

— Je ne l’ai pas fait davantage involontairement. Je reste convaincu qu’il ne faut ébranler ni Foch ni Pétain.

— Alors, nous sommes d’accord. Pétain complète Foch qui n’entre pas, autant que lui, dans les détails d’exécution.

— C’est ce que je vous ai écrit moi-même il y a quelque temps, et je n’ai pas changé d’avis.

— Alors, ça va bien. »

Oui, ça va bien. Mais, une fois de plus, Clemenceau a accueilli des « potins » et s’est montré ombrageux et défiant. Et moi, faute de responsabilité légale et de droit à l’action, je suis, de la part de tous, l’objet des allégations les plus fausses et des suppositions les plus fantaisistes. Et pourquoi faut-il à Clemenceau des témoins ? L’autre jour, c’était Pichon, aujourd’hui c’est Klotz. Clemenceau a certainement cru que j’avais fait venir Briand sinon pour conspirer contre lui, du moins pour ménager un prétendu conspirateur qu’il croit mon meilleur ami (Barthou). Je ne sais ce que fait Briand en ce moment, mais Clemenceau est convaincu qu’il conspire. Des détails de sa conversation me reviennent. « Briand, m’a-t-il dit, va de temps en temps faire un plongeon dans l’Eure, puis il revient intriguer dans les couloirs, » ou bien, « comme en ce moment, il s’installe chez Bunau-Varilla. » Ainsi, Clemenceau suit les moindres gestes de Briand et il s’est évidemment imaginé que si je n’encourageais pas ses critiques, elles ne me déplaisaient pas. Ayant cru de moi tout ce qu’il a cru autrefois, il peut bien encore me supposer capable de ces arrière-