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conseil des ministres

mées, mais aucun détail, et déjà les télégrammes de cette nuit que j’ai lus entre minuit et une heure, pendant une alerte, étaient moins favorables : les contre-attaques allemandes semblaient avoir enrayé notre marche et même rejeté nos éléments avancés.

Ce matin, Conseil des ministres exceptionnel, à propos du projet relatif à l’affaire de l’Aisne. Plusieurs ministres, dont Henri Simon, demandent des renseignements sur les opérations, au lieu d’en donner sur leurs départements respectifs. Clemenceau annonce imprudemment ce que m’avaient dit en grand secret les officiers de liaison, que le général de Mitry doit attaquer du sud au nord les divisions allemandes qui ont traversé la Marne et tâcher de les y rejeter. Je fais remarquer au Conseil que cette attaque n’ayant pas commencé ce matin, il serait dangereux d’y faire la moindre allusion et que ce qui a permis à celle d’hier de réussir, c’est que la surprise a été complète. Clemenceau me prie ensuite de donner successivement la parole à Jeanneney et à Ignace.

Jeanneney lit une note qu’il m’a communiquée et qui conclut à la nomination d’une commission d’enquête consultative au sujet de l’affaire de l’Aisne. D’après cette note, ce seraient les commissions parlementaires qui choisiraient les deux délégués. Clemenceau indique que sur ce point il y a un changement, c’est que les commissions ne voteront pas sur le choix de leurs délégués et que les présidents de ces commissions seront désignés par le ministre de la Guerre comme membres civils de la commission d’enquête, avec Guillaumat comme troisième membre.

Ignace lit ensuite le projet de loi transformant la faute professionnelle des généraux en délit et instituant une juridiction spéciale. La plupart des membres du Conseil paraissent ahuris. Loucheur