Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 10, 1933.djvu/338

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Jeudi 29 août.

Albert Lebrun m’amène Mirman que nous essayons de détourner d’un projet de démission. Il promet d’attendre la prochaine session du Conseil général de Meurthe-et-Moselle avant de prendre un parti définitif, mais il se plaint que l’union sacrée soit atteinte dans son département et voudrait aller combattre comme chasseur à pied.

Clemenceau vient, comme il aime à dire, au rapport : « Ah ! ces Italiens ! Nous ne finirons pas la guerre sans nous battre avec eux ou alors nous nous battrons après !

— Ni avant, ni après, dis-je ; mais il faut leur faire comprendre qu’ils ne jouent pas suffisamment leur partie dans la guerre.

— Oh ! leur offensive, je m’en moque. À quoi bon ? Foch est venu m’en parler. Mais je lui ai dit : « Ils n’auront ni tanks ni ypérite. » Pétain voulait leur donner 75 tanks et Foch se serait contenté de 25. Mais ni 75, ni 25 ! Nos soldats ont besoin des tanks. Je ne les enverrai certainement pas aux Italiens. Quant à l’ypérite, nous n’en avons pas assez et il vaut mieux en donner un peu à Salonique. Vous devez voir le général Diaz demain ? Je le verrai avant vous et je vous rapporterai notre conversation pour que nous soyons bien d’accord.

— Eh bien, je ne partage pas votre opinion sur l’inactivité italienne. Elle me paraît fâcheuse, et risque d’avoir pour conséquence l’envoi en France de nouvelles divisions autrichiennes.

— Tant mieux, tant mieux. Plus nous en aurons, plus nous en battrons.

— Il y en a de bonnes qui ne sont pas à dédaigner. Il est désirable qu’elles soient retenues en Italie. Mon avis est donc qu’il faut pousser les Italiens à agir. Si vous ne voulez pas leur donner