Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 10, 1933.djvu/433

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
421
CLEMENCEAU ET PICHON

— Très bien, c’est la meilleure solution, puisque c’est vous qui présidez.

— Nous lui ferons des ovations et nous le recevrons, bien entendu, triomphalement. »

Clemenceau me parle ensuite de l’Académie. « J’aurais refusé, dit-il, si je n’avais accepté d’être docteur à Oxford ; je ne puis blesser l’Académie, après avoir accepté des offres analogues à l’étranger. Mais on ne me demandera pas de remplir effectivement des fonctions académiques. Quant à la lettre, j’aime mieux m’en tenir à la réponse que j’ai faite à Capus, ne m’en demandez pas davantage.

— Vous auriez pu, ce me semble, remercier simplement par écrit l’Académie de son offre.

— Non, non, n’insistez pas.

— Vous serez élu de toutes façons à l’unanimité et j’irai voter pour vous jeudi.

— Je n’ose vous remercier.

— Si, si, remerciez-moi. Je dirai à l’Académie que vous m’avez remercié.

— Ah ! non ! je ne vous remercie pas. Pichon en est témoin. Je n’ai rien dit de pareil.

— C’est vrai, lui dis-je en lui tapant sur l’épaule amicalement. Vous continuez à amener votre témoin.

— Non, non, je vous assure, ce n’est pas comme témoin que j’amène Pichon. Mais il m’est utile dans les questions que nous avons à examiner maintenant. C’est un excellent ministre des Affaires étrangères ; il a beaucoup de jugement. (Pichon boit du lait.)

— Oui, certes ; c’est un excellent ministre. Je ne lui reproche que d’être un peu trop timide vis-à-vis de vous.

— Oh ! je le bouscule de temps en temps parce que je l’ai vu enfant. Cela ne retire rien à ses qualités. »