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LA VICTOIRE

Les journaux de ce matin publient des lettres échangées entre Clemenceau et Lemery, qui maintient sa démission.

Conseil des ministres. Clemenceau fait venir Godin, directeur de son cabinet civil, qui a préparé le voyage en Alsace. Il y a eu ordre et contre-ordre.

Clemenceau m’avait dit mercredi que les Chambres pour lesquelles on a, avec beaucoup de peine, organisé plusieurs trains pour Strasbourg, demandaient également à aller à Metz, mais que cela était impossible. Une bonne heure après il a changé d’avis à la suite d’une démarche d’adversaires du cabinet. On a voulu tout changer. Les Chambres viendront à Strasbourg et à Metz et partiront pour Strasbourg avant nous.

Le Conseil s’occupe ensuite de la réception de Wilson. Pams prétend que Paris est envahi par la police américaine qui ne veut pas laisser le président passer dans des rues étroites, par peur d’attentats anarchistes. Clemenceau dit que le colonel House lui a donné à entendre que Wilson siégerait effectivement au Congrès de la paix. Au fond, c’est le désir secret de Clemenceau, qui veut toujours présider Wilson. Mais je trouve très choquant qu’un chef d’État étranger siège en France dans une conférence et je le dis tout net à Clemenceau en Conseil. J’ajoute que le roi d’Angleterre a déclaré qu’en ce cas, nous devions siéger aussi, lui et moi. Leygues et Lebrun m’appuient tout haut. Les autres ministres se taisent, quoique plusieurs m’aient avoué être de mon avis. Clemenceau dit encore que, d’après le colonel House, il y a des tiraillements entre Foch et Pershing à propos de l’occupation en Allemagne. House a prié Clemenceau d’intervenir en faveur de Pershing. Mais, ajoute Clemenceau, je n’en ferai rien.