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LA VICTOIRE

Haig et Foch sur cette formule : « Les gouvernements anglais et français chargent le général Foch de coordonner l’action des armées alliées sur le front ouest. Les généraux en chef devront lui fournir tous renseignements utiles. »

Clemenceau et Milner signent ce papier. Progrès sérieux. Ce n’est pas encore l’unité de commandement, mais c’est déjà un acheminement et un progrès.

Pour la bataille d’Amiens, la solution est, au total, satisfaisante parce que Foch s’est montré le plus résolu à tenir. Cependant, pendant le déjeuner, il a été un peu moins catégorique sur la facilité du succès qu’il ne l’avait été avant la signature du papier. Et Loucheur le lui a reproché en plaisantant : « Cela, c’est du Foch d’après le papier. » Foch ne l’a pas très bien pris.

Nous avons déjeuné de deux à deux heures trois quarts à l’hôtel des Quatre-Fils-Aymon. Haig ne nous avait pas invités. Clemenceau avait très mal à l’estomac, il bâillait sans cesse. Il n’a guère mangé que des pommes de terre cuites sous la cendre, en guise de pain, et des haricots verts.

Au retour, nous avons trouvé les routes encombrées de convois de réfugiés. Nous voici ramenés aux mauvais jours de 1914. Tout le terrain gagné depuis lors a été reperdu et au delà. Pauvre Nesle, pauvre Noyon, pauvre Ham ! Braves gens que j’étais allé saluer à leur retour dans la famille française !…

Je rentre à l’Élysée vers six heures. Nail vient. Il ne paraît pas satisfait de la combinaison Foch. Il la trouve un peu hybride. Mais il est rassuré au moins en partie par le fait qu’on porte l’effort devant Amiens.


Mercredi 27 mars.

À dix heures du matin, voici de nouveau Dubost.