Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/114

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me sens fier que ce soient des camarades vitriers qui offrent, les premiers, à la France la gloire de ce butin symbolique. Ces heureuses communications me font, sans doute, tressaillir de joie et d’espérance. Mais que les Allemands soient déjà aux approches de Saint-Mihiel, c’est ce qui me paraît, malgré tout, d’assez fâcheux augure ; c’est ce qui, par surcroît, me représente nos revers sous la forme la plus sensible et la plus brutale, puisque mes yeux, accoutumés à ces paysages meusiens, voient réellement de loin les combats qui les souillent.

Pendant que la fortune hésite à se fixer, la propagande impériale continue à faire rage dans le monde entier. M. Chevalley nous envoie de Christiania quelques spécimens des fables qu’elle répand à profusion1 : « Brutalités des Belges à Anvers contre les Allemands expulsés. Les quinze cents prisonniers français arrivés à Berlin avaient de vieux uniformes en loques et faisaient pitié. » Et encore, ce communiqué paru dans la Gazette de l’Allemagne du Nord et distribué en Norvège2 : « En dépit du droit des gens, une guerre populaire s’organise en France. Nous fusillerons sans pitié les civils combattants ou destructeurs de moyens de communication. Ce n’est pas l’Allemagne, c’est la France qui sera responsable des flots de sang que cela va coûter… La Belgique a voulu la guerre. Des civils, des enfants nous attaquent. Si la guerre prend désormais un caractère féroce, la Belgique en. portera la responsabilité. » M. Thiébaut nous donne, à son tour, des exemples recueillis à Stockholm3 : «