Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/169

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Qu’est-il advenu de notre 5e armée ? » Sa réponse n’est pas meilleure que pour la 4e. La 5e, commandée par le général Lanrezac, occupait la région de Charleroi et avait en face d’elle les forces allemandes de von Klück et de von Bülow, qui, de l’est à l’ouest, marchaient rapidement vers la mer, avec l’évidente volonté de dépasser notre front, de déborder les troupes anglaises et de nous tourner à la hauteur de Lille. Pour parer à ce danger, le général Joffre avait créé une armée nouvelle, à la gauche de l’armée britannique, et il en avait confié le commandement au général d’Amade, qui s’est naguère signalé au Maroc. Le général Lanrezac brûlait, depuis plusieurs jours, de prendre l’offensive, mais il avait dû attendre les Anglais, qui n’étaient pas à pied d’œuvre. Membre du conseil supérieur de la guerre depuis le 10 avril dernier, le général Lanrezac est un de nos chefs les plus éminents. Je l’ai eu à déjeuner avec le général Joffre peu de jours après sa nomination, et il m’a été représenté par le commandant en chef comme un maître en science militaire. Il a l’esprit très vif et parait, tout à la fois, ardent et réfléchi. Le général Joffre m’a dit : « C’est un futur généralissime. »

Lanrezac aurait souhaité de pouvoir porter plus tôt son armée vers Maubeuge, mais le grand quartier général, préoccupé d’abord de ce qui se passait sur nos frontières de l’Est, ne disposait pas, au début, d’assez de forces dans le Nord pour allonger notre front et, forcé, en outre, d’attendre la concentration de l’armée anglaise, il n’avait pu donner, aussi vite qu’il eût été désirable, l’ordre de commencer les opérations. Lorsqu’on a appris l’occupation de Bruxelles, la marche foudroyante