Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/198

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et sur le déclassement demandé par le Conseil supérieur de la guerre11. Il m’a à peine écouté. Il m’a reproché d’avoir laissé nommer là le général Percin, dont il m’a parlé avec la même sévérité qu’il montrait l’autre jour à l’égard du général de Castelnau, car il sait être éclectique dans ses animosités. Je lui ai répondu que le général Percin avait reçu son affectation il y a six ans, à une époque où je n’étais ni président de la République, ni membre de gouvernement, mais c’est à peine s’il a entendu ce que je lui disais. Il m’a reproché de n’avoir pas surveillé ou de n’avoir pas remanié les communiqués de la guerre, comme si un ministre quelconque eût pu admettre une telle ingérence de ma part et comme si lui-même, le cas échéant, il l’eût admise. Il m’a reproché d’avoir constitué, il y a quelques semaines, un cabinet de « nullités », pour en être plus facilement le « maître », comme si lui-même, à d’autres heures, il n’avait pas reconnu et proclamé la valeur de Viviani et comme si j’étais jamais sorti d’un rôle constitutionnel dont la pauvreté m’est souvent pénible, mais dont la scrupuleuse observation m’apparaît comme un devoir et comme une condition de salut public. Il m’a reproché d’avoir constitué hier un ministère « louche » où les socialistes apporteraient des arrière-pensées politiques, où MM. Briand, Delcassé, Millerand feraient des efforts intéressés de désagrégation, où se prépareraient fatalement le désordre et la défaite. Il m’a reproché de sacrifier à des vues égoïstes les destinées de la France. Bref, il m’a parlé, pendant