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ministre britannique passe pour un vaillant soldat et pour un administrateur émérite. Il était sur le point de repartir pour l’Égypte, lorsque M. Asquith l’a rappelé et choisi comme successeur. À peine nommé, lord Kitchener est venu voir M. Paul Cambon et lui a dit que, dès hier soir, avaient été donnés les ordres pour les premiers transports de troupes en France. On a l’intention de nous envoyer six divisions, mais l’organisation militaire de la Grande-Bretagne ne lui permet pas de les expédier toutes dès maintenant25. Il nous faut donc patienter encore.

C’est au moment où toute notre attention est absorbée par la guerre déjà commencée que je reçois, dans la journée du 6 août, la visite de M. Myron T. Herrick, ambassadeur des États-Unis. MM Viviani, Doumergue, Messimy, Augagneur, Malvy, sont dans mon cabinet, lorsqu’un huissier me l’annonce. Nous nous demandons quel peut bien être l’objet de sa démarche. Peut-être est-il chargé par le président Woodrow Wilson de nous offrir une médiation. Les ministres examinent avec moi quelle réponse il conviendrait, dans cette hypothèse, de faire à 1’Amérique. Ils pensent, comme moi, que n’étant pas les agresseurs, nous ne pourrions plus accepter une médiation que si l’Allemagne et l’Autriche commençaient elles-mêmes par s’y soumettre et par retirer leurs troupes ; qu’au surplus, nous n’avons pas le droit de prendre parti sans nous mettre d’accord avec l’Angleterre, la Belgique et la Russie ; qu’enfin l’intervention américaine parait bien tardive après l’invasion d’un territoire neutre. Il est convenu que