Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/341

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précis que reçoit mon frère Lucien, les Allemands ont pris chez lui, à Triaucourt, et emporté sur des camions mes portraits et photographies ; et, chose plus odieuse, dans le petit village de Nubécourt, ils ont forcé la porte close de notre paisible cimetière familial pour inhumer plusieurs de leurs officiers auprès des tombes où mes parents et mes grands-parents dorment sous les pervenches, là même où ma femme et moi, nous irons rejoindre ceux qui nous ont tant aimés. J’ai quelque peine, malgré tout, à détourner ma pensée de ces horreurs…

Le gouvernement a demandé à l’armée belge de coopérer à l’action que Joffre se propose d’entreprendre pour dégager enfin nos départements du Nord et la Belgique elle-même. M. Klobukowski a vu M. de Broqueville11. Il l’a trouvé, nous dit-il, dans les dispositions qu’il lui a toujours connues depuis le début des hostilités : énergique, très confiant et décidé à tenir jusqu’au bout. Les résolutions du roi sont les mêmes. Notre ministre ajoute : « J’ai recueilli la meilleure impression sur l’action qui se prépare avec une grande activité et à laquelle l’armée belge participera avec ardeur. »

Pendant que nos alliés et nous, nous formons ces beaux projets, les Allemands continuent à bombarder la cathédrale de Reims et, pour essayer d’excuser ce forfait, leur propagande imagine une nouvelle légende. Le ministre d’Allemagne à Copenhague remet au gouvernement danois une note où est rejetée sur la France la responsabilité de l’incendie de la basilique. Si les mortiers ennemis ont tiré sur les tours, c’est, prétend-on, qu’un