Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/505

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pessimisme aigu. Il ne voit plus qu’un moyen de sauver la France : appeler coûte que coûte les Japonais en Europe et payer leur concours du prix, quel qu’il soit, qu’ils réclameront : au besoin l’Indo-Chine.

Avec assez d’habileté, Delcassé remet les choses au point. Il expose les négociations qui ont été engagées avec le Japon, les difficultés rencontrées, les hésitations du gouvernement de Tokyo. Il croit que le Japon ne convoite nullement l’Indo-Chine, mais qu’il désire que ses relations douanières avec notre colonie soient réglées par les mêmes conventions qu’avec la France. Le Conseil autorise Delcassé à promettre cette concession. Le ministre des Affaires étrangères pense que le Japon souhaiterait, en outre, une aide financière pour mettre en valeur la Mandchourie et la Corée. C’est également une offre qui peut lui être faite. Mais il faudrait surtout que la Russie consentît à signer un traité d’alliance avec le Japon et lui reconnût en Chine certaines sphères d’influence. Il est entendu que Delcassé cherchera à convaincre la Russie et l’Angleterre de la nécessité d’accorder certaines compensations au gouvernement de Tokyo, en vue de contracter, s’il est possible, une alliance à quatre.

Millerand, plus sombre que je ne l’ai jamais vu, m’entretient des télégrammes de Russie, qui sont, en effet, de plus en plus inquiétants. Il semble que l’état-major russe cherche à nous rendre responsables de ses échecs. Comment, avec sa supériorité numérique, l’armée russe est elle aussi impuissante ? Comment le grand-duc Nicolas peut-il songer à garder la défensive ? J’engage Millerand à répondre que nous continuons à supporter