Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/145

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Mardi 30 mars.

Millerand vient me voir avant le Conseil et me rapporte la conversation qu’il a eue hier à Paris avec Kitchener. Le ministre anglais promet d’envoyer en France deux divisions nouvelles d’ici à la fin d’avril, de manière qu’à cette date Joffre puisse dégager le IXe et le XXe corps et avoir huit corps d’armée de manœuvre. Pour l’opération des Dardanelles, Kitchener est d’avis de faire débarquer le corps expéditionnaire par la mer Egée dans le sud de la presqu’île de Gallipoli, derrière Sedil Bahr, en face de Tchanak.

D’après les renseignements d’Augagneur, les forts ont été endommagés par notre bombardement, mais un seul canon a été mis hors de service et les résultats sont, en somme, très médiocres. Cependant, M. Winston Churchill voulait que la marine continuât son action sans attendre les troupes de terre ; l’amiral anglais de Robeck n’a pas été du même avis et ses observations l’ont emporté.

Sur la question du commandement des armées de terre, Kitchener a déclaré qu’il était entièrement d’accord avec Joffre pour considérer l’unité comme nécessaire. Il a, dès le début de la guerre, donné des instructions à French et il est prêt à les communiquer à Paul Cambon pour qu’au besoin Joffre puisse s’en prévaloir. « Mais, dit-il, pourquoi ne nommez-vous pas Joffre maréchal ? French ne cesse de m’objecter que lui, il est maréchal et que Joffre n’est que général. »

Pour la base maritime, Kitchener persiste à réclamer Dunkerque, mais il a été frappé de certaines observations de Joffre et il demande que la question soit examinée sur place dans une conférence mixte. Kitchener affirme que, d’après ses