Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/76

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affirme son unanimité sur quelques idées essentielles : La France n’a fait que suivre, dans la voie des armements, les puissances de la Triple-Alliance ; elle a multiplié les efforts pour éviter la guerre ; mais puisqu’on la lui a imposée, elle la poursuivra jusqu’au bout ; elle ne la considérera comme terminée que le jour où l’impérialisme allemand sera anéanti, l’Europe libérée, la Belgique reconstituée, l’Alsace-Lorraine reprise ; enfin, promesse d’étroite solidarité avec nos alliés. Le papier de Viviani est d’un style un peu boursouflé, mais il répond clairement aux préoccupations qu’a éveillées la délibération socialiste. Sur mon avis, le président du Conseil en donne lecture, le jeudi matin, à ses collègues. Guesde ne fait aucune difficulté. Sembat, arrivé de Londres vers onze heures seulement, et ne connaissant rien des orages qu’il a déchaînés, essaye d’obtenir qu’on laisse entrevoir, à propos de l’Alsace-Lorraine, la possibilité d’un plébiscite ou que, tout au moins, on n’exclue pas à priori cette consécration de la reprise. Mais tout le monde lui répond, comme moi, qu’il serait, en ce cas, impossible de refuser le vote aux immigrés et que la consultation serait fatalement faussée. « Oui, c’est vrai, répond Sembat, mais les premières élections alsaciennes équivaudraient à une adhésion nouvelle. — Et s’il se trouve que des députés protestataires soient élus, riposte Augagneur, rendrez-vous l’Alsace ? Non, n’est-ce pas ? » Peu à peu, Sembat lui-même convient que l’Alsace, ayant proclamé son attachement à la France à la Fédération de 1790, ayant protesté en 1870 contre l’annexion, n’ayant jamais été appelée à la ratifier, ne l’ayant jamais acceptée, la reprise ne sera qu’une restitution. Rien n’est donc changé au texte de Viviani. Il le lit tel quel à la Chambre