Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/190

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vérifié toutes ces hypothèses à la fois ? Croira-t-on avec une seule équation avoir déterminé plusieurs inconnues ?

Il faut également avoir soin de distinguer entre les différentes sortes d’hypothèses. Il y a d’abord celles qui sont toutes naturelles et auxquelles on ne peut guère se soustraire. Il est difficile de ne pas supposer que l’influence des corps très éloignés est tout à fait négligeable, que les petits mouvements obéissent à une loi linéaire, que l’effet est une fonction continue de sa cause. J’en dirai autant des conditions imposées par la symétrie. Toutes ces hypothèses forment pour ainsi dire le fonds commun de toutes les théories de la physique mathématique. Ce sont les dernières que l’on doit abandonner.

Il y a une seconde catégorie d’hypothèses que je qualifierai d’indifférentes. Dans la plupart des questions, l’analyste suppose, au début de son calcul, soit que la matière est continue, soit, inversement, qu’elle est formée d’atomes. Il aurait fait le contraire que ses résultats n’en auraient pas été changés ; il aurait eu plus de peine à les obtenir, voilà tout. Si alors l’expérience confirme ses conclusions, pensera-t-il avoir démontré, par exemple, l’existence réelle des atomes ?

Dans les théories optiques s’introduisent deux vecteurs que l’on regarde, l’un comme une vitesse, l’autre comme un tourbillon. C’est là encore une hypothèse indifférente, puisqu’on serait arrivé aux mêmes conclusions en faisant précisément le