Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/217

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Mais cela ne suffit pas ; pour qu’une explication mécanique soit bonne, il faut qu’elle soit simple ; il faut que, pour la choisir entre toutes celles qui sont possibles, on ait d’autres raison que la nécessité de faire un choix. Eh bien, une théorie qui satisfasse à cette condition et par conséquent qui puisse servir à quelque chose, nous n’en avons pas encore. Devons-nous nous en plaindre ? Ce serait oublier quel est le but poursuivi ; ce n’est pas le mécanisme, le vrai, le seul but, c’est l’unité.

Nous devons donc borner notre ambition ; ne cherchons pas à formuler une explication mécanique ; contentons-nous de montrer que nous pourrions toujours en trouver une si nous le voulions. À cela, nous avons réussi ; le principe de la conservation de l’énergie n’a reçu que des confirmations ; un second principe est venu s’y joindre, celui de la moindre action, mis sous la forme qui convient à la physique. Lui aussi a toujours été vérifié, au moins en ce qui concerne les phénomènes réversibles qui obéissent ainsi aux équations de Lagrange, c’est-à-dire aux lois les plus générales de la mécanique.

Les phénomènes irréversibles sont beaucoup plus rebelles. Eux aussi cependant s’ordonnent et tendent à rentrer dans l’unité ; la lumière qui les a éclairés nous est venue du principe de Carnot. Longtemps la thermodynamique s’est confinée dans l’étude de la dilatation des corps et de leurs changements d’état. Depuis quelque temps, elle s’est enhardie et elle a considérablement élargi