Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/230

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ralité. La généralité peut être poussée plus loin encore : on peut se demander la probabilité pour qu’une fonction satisfasse à une condition donnée ; il y a alors autant de cas possibles qu’on peut imaginer de fonctions différentes. C’est le troisième degré de généralité, auquel on s’élève, par exemple, quand on cherche à deviner la loi la plus probable d’après un nombre fini d’observations.

On peut se placer à un point de vue tout différent. Si nous n’étions pas ignorants, il n’y aurait pas de probabilité, il n’y aurait de place que pour la certitude ; mais notre ignorance ne peut être absolue, sans quoi il n’y aurait pas non plus de probabilité, puisqu’il faut encore un peu de lumière pour parvenir même à cette science incertaine. Les problèmes de probabilité peuvent ainsi se classer d’après la profondeur plus ou moins grande de cette ignorance.

En mathématiques, on peut déjà se proposer des problèmes de probabilité. Quelle est la probabilité pour que la 5e décimale d’un logarithme pris au hasard dans une table soit un 9 ? On n’hésitera pas à répondre que cette probabilité est . Ici nous possédons toutes les données du problème ; nous saurions calculer notre logarithme sans recourir à la table ; mais nous ne voulons pas nous en donner la peine. C’est le premier degré de l’ignorance.

Dans les sciences physiques, notre ignorance est déjà plus grande. L’état d’un système, à un