Page:Poincaré - La Science et l’Hypothèse.djvu/296

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deux hypothèses restent admissibles : ou bien les électrons sont plus lourds, parce qu’en dehors de leur inertie électromagnétique empruntée ils ont une inertie mécanique propre, et alors ce sont eux qui sont la vraie matière ; ou bien ils sont sans masse comme les autres, et s’ils nous paraissent plus lourds, c’est parce qu’ils sont plus petits. Je dis bien plus petits, quoique cela puisse paraître paradoxal ; car dans cette conception le corpuscule ne serait qu’un vide dans l’éther, seul réel, seul doué d’inertie.

Jusqu’ici la matière n’est pas trop compromise ; nous pouvons encore adopter la première hypothèse, ou même croire qu’en dehors des électrons positifs et négatifs, il y a des atomes neutres. Les récentes recherches de Lorentz vont nous enlever cette dernière ressource. Nous sommes entraînés dans le mouvement de la Terre, qui est très rapide ; les phénomènes optiques et électriques ne vont-ils pas être altérés par cette translation ? On l’a cru longtemps, et on a supposé que les observations décèleraient des différences, suivant l’orientation des appareils par rapport au mouvement de la Terre. Il n’en a rien été, et les mesures les plus délicates n’ont rien montré de semblable. Et en cela les expériences justifiaient une répugnance commune à tous les physiciens ; si on avait trouvé quelque chose en effet, on aurait pu connaître non seulement le mouvement relatif de la Terre par rapport au Soleil, mais son mouvement absolu dans l’éther. Or, beaucoup de personnes ont peine