Page:Poincaré - La Valeur de la science.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
166
LA VALEUR DE LA SCIENCE

qui n’estiment que les applications pratiques. Certes, ce point de vue n’est pas le mien ; moi, au contraire, si j’admire les conquêtes de l’industrie, c’est surtout parce qu’en nous affranchissant des soucis matériels, elles donneront un jour à tous le loisir de contempler la Nature ; je ne dis pas : la Science est utile, parce qu’elle nous apprend à construire des machines ; je dis : les machines sont utiles, parce qu’en travaillant pour nous, elles nous laisseront un jour plus de temps pour faire de la science. Mais enfin il n’est pas indifférent de remarquer qu’entre les deux points de vue il n’y a pas de désaccord, et que l’homme ayant poursuivi un but désintéressé, tout le reste lui est venu par surcroît.

Auguste Comte a dit, je ne sais où, qu’il serait vain de chercher à connaître la composition du Soleil, parce que cette connaissance ne pourrait être d’aucune utilité pour la Sociologie. Comment a-t-il pu avoir la vue si courte ? Ne venons-nous pas de voir que c’est par l’Astronomie que, pour parler son langage, l’humanité est passée de l’état théologique à l’état positif. Cela, il s’en est rendu compte, parce que c’était fait.

Mais comment n’a-t-il pas compris que ce qui restait à faire n’était pas moins considérable et ne serait pas moins profitable ? L’Astronomie physique, qu’il semble condamner, a déjà commencé à