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LA VALEUR DE LA SCIENCE

posent naturellement et dont nous venons de dire quelques mots.

Je ne veux nullement rechercher ici les fondements du principe d’induction ; je sais fort bien que je n’y réussirai pas ; il est aussi difficile de justifier ce principe que de s’en passer. Je veux seulement montrer comme les savants l’appliquent et sont forcés de l’appliquer.

Quand le même antécédent se reproduit, le même conséquent doit se reproduire également ; tel est l’énoncé ordinaire. Mais réduit à ces termes ce principe ne pourrait servir à rien. Pour qu’on pût dire que le même antécédent s’est reproduit, il faudrait que les circonstances se fussent toutes reproduites, puisqu’aucune n’est absolument indifférente, et qu’elles se fussent exactement reproduites. Et, comme cela n’arrivera jamais, le principe ne pourra recevoir aucune application.

Nous devons donc modifier l’énoncé et dire : si un antécédent A a produit une fois un conséquent B, un antécédent A' peu différent de A, produira un conséquent B' peu différent de B. Mais comment reconnaîtrons-nous que les antécédents A et A' sont « peu différents » ? Si quelqu’une des circonstances peut s’exprimer par un nombre, et que ce nombre ait dans les deux cas des valeurs très voisines, le sens du mot « peu différent » est relativement clair ; le principe signifie alors que le