Page:Poincaré - Leçons sur les hypothèses cosmogoniques, 1911.djvu/243

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
217
sur l’origine de la chaleur solaire et de la chaleur terrestre

stationnaire, est atteint ; là, au contraire, nous supposions avec Lord Kelvin, que la Terre était partie d’un état initial où la température était uniforme, et que le refroidissement n’avait pas encore eu le temps de gagner le centre. L’une des deux hypothèses n’est pas plus invraisemblable que l’autre.

159.— Jusqu’ici nous avons toujours admis que le refroidissement se faisait par contact, c’est-à-dire que la Terre arrivant dans un milieu à température zéro, sa superficie prenait immédiatement et conservait la température zéro de ce milieu. Ce n’est pas ainsi que les choses se passent et en réalité le refroidissement se fait plutôt par rayonnement : la surface de la Terre ne prend pas la température zéro du milieu environnant, mais elle perd par unité de temps une quantité de chaleur proportionnelle à l’excès de la température de sa superficie sur celle du milieu ambiant. Ce flux de chaleur perdue étant lui-même proportionnel à la dérivée normale de la température, la condition qui doit maintenant être remplie à la surface est

étant une constante. Dans cette nouvelle hypothèse, la superficie n’étant pas à la température zéro, mais à une température supérieure, le refroidissement se fera plus lentement que dans l’ancienne hypothèse.

160.Dans tous les cas, c’est par sa surface que la Terre se refroidit. La croûte superficielle, l’écorce terrestre, se contracte et doit bientôt, semble-t-il, devenir trop petite pour le noyau qu’elle enveloppe. Des fentes devraient donc s’y produire, semblables à celles qui, d’après MM. Loewy et Puiseux, existent à la surface de la Lune. Or, ce sont au contraire des couches plissées que les géologues observent dans les régions tourmentées. On est donc porté à croire que la croûte est devenue trop large pour le noyau qu’elle recouvre, et que c’est le noyau qui se contracte plutôt que l’écorce.

Il ne faudrait pas dire : la croûte superficielle recevant de la chaleur du Soleil et le noyau n’en recevant pas, c’est le noyau qui doit se refroidir et non la croûte superficielle. Ce raisonnement serait défectueux, car c’est toujours par la superficie que la chaleur s’échappe.