Page:Poincaré - Thermodynamique (ed. 1908).djvu/73

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corps comme résultant du mouvement de ses molécules matérielles et de voir dans la chaleur une transformation des mouvements sensibles. D'ailleurs cette hypothèse n'était pas nouvelle ; elle avait été introduite deux siècles auparavant, mais sans aucune raison scientifique, par François Bacon, puis par Boyle, puis reprise plus tard par Euler. La théorie de Fresnel n'apportait donc, en réalité, qu'une confirmation partielle d'une hypothèse déjà ancienne.

49.

Quoi qu'il en soit, quelque temps avant sa mort prématurée, Carnot possédait sur la chaleur des idées tout à fait conformes à nos idées actuelles. Il les consigna dans des Notes manuscrites qui restèrent ignorées jusqu'en 1871 ; leur lecture ne laisse aucun doute sur l'importance des progrès qui seraient résultés d'une publication plus hâtive.

Nous y trouvons en effet :

« La chaleur n'est autre chose que la puissance motrice, ou plutôt que le mouvement qui a changé de forme. C'est un mouvement dans les particules du corps. Partout où il y a destruction de force motrice, il y a en même temps production de chaleur en quantité précisément proportionnelle à la quantité de puissance motrice détruite. Réciproquement : partout où il y a production de chaleur, il y a destruction de puissance motrice », et « l'on peut poser en thèse générale que la puissance motrice est en quantité invariable dans la nature ; qu'elle n'est jamais, à proprement parler, produite ou détruite. À la vérité, elle change de forme, c'est-à-dire qu'elle produit tantôt un genre de mouvement, tantôt un autre, mais qu'elle n'est jamais anéantie. »