Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/108

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— Parbleu ! quand il verse, et cela arrive souvent, jamais il n’a d’avaries graves.

— Vous dites que cela lui arrive souvent.

— Sans doute.

— Alors, c’est imprudent d’essayer de rattraper. Beauvoisin avec sa jument grise va un train d’enfer.

— Je le reconnais, puisque Putiphar est obligé de galoper. J’ai promis, vous comprenez n’est-ce pas, j’ai promis d’être un des témoins de la mariée, et ne puis vraisemblablement arriver une demi-heure après tout le monde. Allez, Putiphar, allez !

Et le fouet s’abattit de nouveau sur la bête qui prit un galop désuni tout à fait désagréable. Le cabriolet ébranlé craquait et la ferraille sonnait furieusement, lorsque les roues rencontraient les flaques de cailloux qu’un cantonnier avisé avait semées de-ci de-là sur la route.

— Ne craignez rien, disait le docteur Boulard, ne craignez rien, je ne sors que rarement des bornes au-delà desquelles il n’y a plus de limites et ma voiture a les mêmes principes que moi.

Beaugoujat cramponné au tablier n’eut aucune envie de continuer la discussion.

— Et puis, continua le praticien, si j’ai la chance, comme cela m’arrive communément, d’assez bien tomber, je pourrai vous être de quelque secours si vous vous cassez quelque chose.

Ils arrivèrent toutefois sans encombre à Braye où devaient avoir lieu les cérémonies civiles et religieuses.

Le médecin eut tout juste le temps de sauter de son cabriolet, car le père Beauvoisin, homme expéditif, était déjà, sa fille au bras, dans l’escalier de la mairie.

— Je vous recommande mon cheval, dit-il à Beaugoujat.

— Ah ! mon vieux lapin, grommela le greffier, tu peux te fouiller et ta bête aussi.

Mais Putiphar ne sembla nullement choqué du procédé. Sa longue carrière l’avait habitué au mépris des hommes qu’il dédaignait sans doute afin de leur rendre la pareille. — Œil pour œil, dent pour dent.