Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/85

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impitoyable enfin au vaillant peuple des Boers. D’où surgira la Libre-Pensée qui remplacera la guerre par le travail ?

Le fermier Beauvoisin se souciait de celle de Courtamblaize comme d’une guigne durcie. Il était, lui, le vrai libre-penseur.

Il faisait réparer sa vieille horloge et ses montres par Trouillard, le rouge, comme il l’appelait, et lui vendait du beurre et des œufs, mais Trouillard avait voulu vainement l’embrigader dans sa Libre-Pensée.

— J’aime trop ma liberté pour être des vôtres, avait objecté le cultivateur. Quand je rencontre M. le curé du Tilleul-Othon, je fais un brin de causerie avec le digne homme ; je vais à sa messe. Cela me plaît ; de même que j’assiste quelquefois à vos réunions. Vous m’en feriez une sarabande si vous aviez ma signature pour votre société.

L’horloger était revenu bien des fois à la charge, mais sans succès.

— Pourvu que le blé pousse, avait-il coutume de dire à l’horloger, je me déclare satisfait. Vos fariboleries ne changeront rien sur la terre, allez.

Quand les épis sont drus, quand les pommiers ont leurs branches terminées par des pommes et que les prairies sont vertes, tout le monde devrait être content.

— Oui, mais il n’y en a pas assez pour tout le monde.

— Alors, faudrait aviser à qu’il y en ait assez, dit tranquillement Beauvoisin.

— C’est là le but précisément…

— Oui, j’entends bien, mais vous n’en prenez guère le chemin, avec vos disputes. Si vous faisiez comme moi pour ma ferme, j’ajouterais peut-être mon nom à votre liste.

Tenez, écoutez-moi un brin. Je fais vivre, avec mon exploitation, une vingtaine d’ouvriers. Si chacun agissait de même, vous verriez que vos manigances deviendraient inutiles.

Si je parle au curé, j’emploie, d’autre part, votre ami Giraud dont le fils a été baptisé par M. Courtamblaize. Voilà comment je suis.

Le curé me dirait : « Faut renvoyer Giraud. » Je lui