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De l’identité de ces résultats et des précédens, nous pouvons conclure irrévocablement que la force avec laquelle une molécule de sang se meut, soit dans la carotide, soit dans l’aorte, etc., est tout à fait égale à celle qui meut une molécule dans le plus petit rameau artériel[1] : ou en d’autres termes, qu’une molécule de sang se meut avec la même force dans tout le trajet du système artériel ; ce qu’à priori avec tous les physiologistes, nous étions loin de penser[2].

Essayons maintenant de faire connaître par quel mécanisme cette force est la même, soit au commencement du système artériel, soit en un point quelconque de son trajet, nous pourrions dire presque à sa terminaison.

Lorsque le cœur se contracte, une ondée de sang est poussée dans le système artériel, déjà plein de sang ; les phénomènes qui suivent immédiatement la projection de cette ondée sont, la dilatation des artères, une sorte de locomotion de tout le système artériel, par laquelle les courbures tendent à se redresser. Ces phénomènes ne peuvent avoir lieu qu’aux dépens de la force avec laquelle l’ondée est lancée par le cœur ; mais à peine le système artériel s’est-il dilaté, à peine ses courbures ont-elles cédé à l’action du cœur, qu’en vertu de l’élasticité du système artériel, toutes les artères revenant sur elles-mêmes, rendent à la force du sang tout ce qu’elle venait de perdre, et par suite la force avec laquelle l’ondée de sang est lancée du cœur, conserve la même intensité jusqu’aux dernières ramifications artérielles, ainsi que nos expériences l’ont constaté.

  1. Bichat, Anatomie générale, Limites de l’action du cœur, nie cette égalité de forces dans les troncs, les branches et les ramuscules ; mais, malgré tout le respect qu’impose l’opinion d’un aussi grand physiologiste, nous nous voyons forcés d’être d’un sentiment contraire.
  2. Quand nous disons que cette force est la même dans tout le trajet du système artériel, nous n’entendons pas rejeter les modifications qu’elle doit éprouver en certains points de ce système, qui présentent une disposition spéciale, comme les arcades anastomotiques des artères du mésentère, le cercle artériel de Willis, etc.