Page:Pottier - Chants révolutionnaires.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


L’ANTHROPOPHAGE



Au comte Albert de Neuville.


As-tu le cœur bardé de fer ?
N’as-tu rien d’humain que la face ?
Es-tu de marbre, es-tu de glace ?
Alors suis-moi dans mon Enfer.

Je suis la vieille anthropophage
Travestie en société ;
Vois mes mains rouges de carnage,
Mon œil de luxure injecté.
J’ai plus d’un coin dans mon repaire
Plein de charogne et d’ossements ;
Viens les voir ! j’ai mangé ton père
Et je mangerai tes enfants.

Ici, c’est un champ de bataille,
On a fauché pendant trois jours ;
La Faucheuse était la mitraille,
Tous ces glaneurs sont les vautours.
Le blé, dans ces plaines superbes,
Étendait son jaune tapis…
Affamés, triez pour vos gerbes
Ces corps morts d’avec les épis.