Page:Potvin - Le Français, 1925.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
LE FRANÇAIS

«  J’te crois, André, qu’ça rapporte ! » cria madame Duval. « J’ai jamais eu un si beau jardin que depuis trois ans, croyez-moi, Monsieur Morel ! »

Jean-Baptiste Morel, à la vérité, n’avait pas une réserve indéfiniment fournie d’arguments en faveur de sa thèse sur la routine agraire ancestrale ; aussi, ne se sentait-il pas prêt à soutenir longtemps la discussion sur ce sujet surtout avec des gens aussi ferrés que lui semblaient André Duval et sa femme. Il pensa qu’il serait poli de conclure par un signe de vague approbation et chercha une occasion de rompre les chiens, ce qui lui fut d’autant plus facile que, les enfants ayant fini le dessert, André faisait mine de se lever…

« Oui, oui », dit-il « j’sais qu’il y a du bon et qu’on en a toujours à apprendre… Mais vous savez, chacun a son idée… Ah ! j’y pense, voulez-vous me dire où est Jacques ; quand on dit que j’l’ai pas encore vu ! »

«  Jacques est parti, à matin, au petit jour, pour aller faucher du foin bleu au trécarré », répondit fièrement André Duval qui ajouta : « Jacques prétend qu’c’est bon pour les génisses, du foin bleu. Il a apporté son dîner avec lui et il descendra rien qu’à la nuit.  »

Dès qu’on fut levé de table et, comme les deux hommes allumaient leur pipe, André proposa à son ami de visiter sa terre et ses bâtiments. Les granges étaient pleines de la récolte de la saison. Il y avait la grange principale, près de la maison et attenant aux étables, et une autre, plus petite, qu’André avait fait