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LE FRANÇAIS

Des fois, c’est l’mariage qui les sauve. Qu’est-ce qu’tu dis de ça, toi, Jean-Baptiste ? »

Le père de Marguerite restait songeur. Devant les évolutions variées de l’éloquence de son ami, il s’était contenté d’allumer pipe sur pipe pendant que rêveur, ses regards erraient d’une extrémité à l’autre des terres de Duval. L’exaltation qui le soulevait quelques instants auparavant avait visiblement baissé, encore que les flots remuants du verbe d’André Duval cherchaient à la maintenir…

« André », fit-il, soudain, s’arrêtant au milieu du chemin, « je t’ai compris, mais tu dois m’comprendre à ton tour. Tu t’imagines pas, j’suppose, que j’pourrais forcer Marguerite à faire c’que nous voudrons. Non, tu sais, tes projets au sujet d’ton garçon sont les miens par rapport à ma fille. Ce serait du contentement pour moi sans bon sens si tout ça arrivait. Mais comme dirait monsieur le curé, les pères proposent et les enfants, des fois, disposent. Tu sais, j’étais pas mal découragé et tu m’as relevé les esprits quand tu m’as appris le changement de Jacques. Il me semble, asteur, qu’il y aurait moyen d’penser autrement que c’que j’pensais. Pour dire que tout est réglé, on peut pas l’dire non plus. Faut attendre. Comme tu disais, cette affaire du Français, c’est p’t’être bien rien qu’un caprice de ma fille. Quand j’lui dirai c’que tu viens d’m’apprendre rapport à Jacques, c’est possible qu’les choses changent de bord. C’est tout c’que j’peux t’dire, pour le moment, tu comprends, hein ? Faut attendre, faut attendre !…