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LE FRANÇAIS

Ce dernier, qui fumait tranquillement sa pipe près du groupe, fit simplement de la tête un signe affirmatif.

L’on parla des perspectives générales des prochains chantiers. Les chantiers, ou la coupe du bois, dans les forêts sans limites et riches de toutes les essences du « pays de Québec », c’est une question capitale pour les populations des campagnes. L’été, l’on vit de la terre ; l’hiver, pendant que la glèbe se repose, l’on demande à la forêt l’argent qu’il faudra, au printemps, pour acheter quelques nouvelles pièces du roulant de la ferme ou d’autres animaux pour grossir le troupeau. Pendant cinq mois l’on oublie la terre, comme si elle n’existait plus. L’on ne pense qu’à « faire du bois ». Tous les hommes valides, dès les premières neiges, s’empressent d’aller s’engager aux compagnies d’exploitation forestière, et pendant tout l’hiver, il ne restera plus à la ferme que les femmes et les vieux, et quelques garçons qui verront au train dans les étables :

« La compagnie Riordon engage des hommes en masse depuis quelques jours », annonça quelqu’un du village. « Ils veulent faire des gros chantiers, cet hiver, à cause des nouveaux moulins qui vont commencer à marcher au printemps. »

— Ah ! oui, approuve un employé de l’« Outaouais » qui allait plusieurs fois la semaine à Kipawa, j’ai entendu dire que les Riordon voulaient couper cet hiver quarante millions de pieds de bois ; ils engagent pour ça tous les hommes qu’ils peuvent trouver et ils paient des gages terribles. C’est effrayant de ce que ça a