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LE FRANÇAIS

tit bois de sapins, à l’abri de la tourmente qui hurlait de plus belle autour d’eux. Ils eurent assez de force pour prendre quelques provisions et se faire avec leurs haches un abri de branchages pour passer la nuit. Malgré des engelures terribles qui brûlaient la peau, telle était la fatigue qui les accablait qu’ils dormirent toute la nuit, vaincus de la tête aux pieds. Au matin, la tempête avait tombé. Ils aperçurent assez loin devant eux la Pointe-de-la-Mission et jugèrent avec joie qu’ils étaient tombés, la veille, tout près du quai de Fabre. Vous comprendrez qu’ils employèrent le peu de force qui leur restait pour rechausser leurs raquettes et gagner le village où ils arrivèrent, dimanche midi, à demi morts de fatigue. Ils ont été recueillis chez Jos Rainville, la première maison du village en venant du lac. C’est là que j’ai été les voir, hier soir, quand j’ai appris leur aventure chez Pierre Thibault où j’étais allé acheter une certaine quantité de pièces de pin… On ne demande pas si nos deux imprudents sont faibles. Jacques Duval a une main à moitié gelée et des engelures sur toute la figure, et l’autre boite tout bas à cause d’un pied gelé. C’est un miracle qu’ils se soient tous deux réchappés.

Il y eut un silence et M. Larivé continua en conclusion :

« Je vous assure que Jacques Duval, encore qu’il soit bien heureux d’avoir échappé à une mort atroce, en dit contre cette « chienne de vie de campagne »… Et c’est là, M. Morel, qu’il m’a juré qu’il en avait assez,