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LE FRANÇAIS

champs. C’était enfin Marguerite façonnée par l’indépendance, par les mille accidents d’une existence libre, par l’exercice de toutes ses forces, par le contact d’éléments actifs, par la vue continuelle de spectacles d’une nature grandiose, par l’exercice d’une intelligence d’élite aidée d’une instruction dont elle savait profiter, enfin, exaltée par l’amour triomphant… Et cet amour se manifestait ainsi que celui du Français dans sa simple floraison élémentaire, dans son épanouissement aussi naturel, pourrait-on dire, que celui du blé au sein de la terre féconde où la graine a silencieusement germé. Mais cet amour-là n’était pas moins émouvant que l’amour trop sûr de lui-même et trop impatient du frein que le relâchement des mœurs favorise ailleurs, dans les villes… En terre québécoise, règne encore, Dieu merci ! le joug préventif de la foi religieuse. Mais la contrainte que l’amour en subit, s’il en comprime les élans, n’en étouffe pas l’ardeur. La foi le dirige plus sûrement et plus vite vers sa vraie fin sociale : la fondation de la famille, la nombreuse famille à qui l’on doit la petite France laurentienne. L’on y éprouve quand même les meilleurs délices de la vie du cœur…

Léon Lambert était déjà devenu un vrai Canadien du « pays de Québec » ; son amour, si impétueux quand il ne s’agissait que de l’éprouver, avait des frayeurs quand il fallait en faire l’aveu…

Le soleil se préparait à basculer derrière les montagnes d’argent de Cobalt et les flots de la baie s’irradiaient de ses rayons lancés avec violence, pénétrant