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Peter McLeod

tres, tâchez de rassembler trois de vos chefs les plus âgés et envoyez-les à Chicoutimi où ils me trouveront. Avec eux, votre grand frère se rendra dans la grande ville pour parler au gouverneur du pays. J’ai dit… Toi, mon frère le chef, approche…

Le sauvage qui avait transmis à Peter McLeod les plaintes de ses frères s’avança. Peter McLeod lui remit entre les mains une somme de cent dollars — tout l’argent qu’il avait apporté — en lui faisant comprendre d’acheter pour ses congénères les plus dénués la nourriture nécessaire d’ici le printemps.

Et dans ce don royal, Peter McLeod mit tout son cœur… Comme une brusque rafale sur un lac de montagnes, les mille rides d’un large sourire traversèrent la face de cuir des sauvages qui sortirent en faisant force gestes de remerciements et d’amitié… Des grimaces que des années de vent du nord avaient sculptées sur leur visage marron.

La porte, un instant ouverte, fit pénétrer dans la pièce une vague de froid à fouetter des anges du désir brutal d’innombrables verres d’eau de feu :

« Vite, un whisky, vieux !… hurla Peter McLeod, s’adressant aux commis. Puis, se tournant du côté de Pit Tremblay qui dormait comme un sourd, la tête appuyée au mur : « Tu sais, mon vieux, devant les sauvages, il faut pas parler de ça !… »

Un des commis sortit de derrière le comptoir une bouteille dont il remplit des verres. D’un coup sec, Peter McLeod, à la façon d’un mineur californien, lança l’alcool au fond de son gosier.

« On en viderait une cruche, hein… Pit ?