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Peter McLeod

petits pas affairés, se jetaient ensemble sur la friandise, se battaient, puis s’envolaient tranquillement continuer leurs éternels coups de ciseau dans l’azur…

Jusque là, Peter McLeod avait été battu dans presque tous les concours qu’il avait lui-même proposés. Son amour-propre commençait à lui échauffer le sang.

Il voulut faire un maître. On le savait merveilleux nageur. En effet, il nageait contre le ressac, piquait une tête dans vingt pieds d’eau et restait au fond trois minutes ; un amphibie !… Cette fois, il gagna. Il traversa la rivière à la nage, plongea, en arrivant dans le Bassin et resta quatre minutes dans l’eau. Lorsque, aux yeux émerveillés de la foule, il émergea de l’onde, son corps bronzé, splendide, demi-dieu éclatant, on hurla d’enthousiasme. Bénévole, il sourit. Il invita tout le monde à la maison du moulin et paya une tournée… Un homme qui ne paie pas une tournée pour marquer de tels exploits, ce n’est pas un homme. Il faut ce qu’il faut.

Ce succès l’enhardit. Il défia les Montagnais de répéter ce qu’il allait accomplir. À son invitation, la population entière du bourg et les sauvages se portèrent sur le quai. La rivière coulait en bas avec lenteur, infatigable, le long des caps derrière lesquels souriait un joli ciel rose. L’eau était plombée. Au large, on eut dit que l’eau fermentait. Des canots d’écorce faisaient le gros dos sur le quai. Peter McLeod en saisit un, le brandit au bout de ses bras, puis, par une échelle appuyée perpendiculairement à une paroi du quai, descendit le canot sur l’eau. Ensuite, il annonça que du haut de la jetée, il allait sauter dans le canot sans le