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rien, vraiment, qui te fasse défaut. Tu travailles fort et ne fais pas la vie ; il est tout naturel qu’un cultivateur doive toujours travailler plus que les autres et se donner moins d’agréments dans la vie… Il y a des compensations, assurément ; aucun souci, aucune inquiétude… mais c’est le bonheur, ça ! Si j’étais un homme, il me semble que je prendrais plaisir à ce travail, à cette économie, nécessaire partout, mais plus visible chez nous… Connais-tu mon amie d’enfance, la femme du notaire ? Elle n’est pas plus riche que nous, c’est connu : eh bien ! je trouve tout naturel, qu’elle vive avec un certain bien-être ; mais je trouverais extraordinaire que moi, fille de fermier, ayant précisément la même fortune, j’aie la prétention de vivre comme elle.

— Tu les aimes, toi, ces travaux, Jeanne ; à moi, ils me répugnent et je n’en veux plus ; je veux les fuir en m’en allant loin, bien loin, aux États-Unis où l’on gagne tant d’argent ; et je reviendrai au pays ensuite, riche, monsieur

— Beaux projets, que je te souhaite bien voir réaliser. Puisque ta résolution est bien prise et puisque tu reviendras, eh bien ! ta petite fiancée aura le courage de t’attendre. J’aurai du chagrin de ce départ, de cette si longue absence. Mais je l’offrirai en sacrifice