Page:Pouget - Le sabotage, 1911.djvu/8

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quement en pratique la formule « à mauvaise paye, mauvais travail ! » Mais il ne se circonscrit pas à cela seul. De cette formule découlent, par voie de conséquence logique, une diversité de manifestations de la volonté ouvrière en conflit avec la rapacité patronale.

Cette tactique, que nous venons de voir vulgarisée en Angleterre, dès 1889, et préconisée et pratiquée dans les organisations syndicales, ne pouvait pas tarder à passer la Manche. En effet, quelques années après, elle s’infiltrait dans les milieux syndicaux français.

C’est en 1895 que, pour la première fois, en France, nous trouvons trace d’une manifestation théorique et consciente du sabotage :

Le Syndicat National des Chemins de Fer menait alors campagne contre un projet de loi, — le projet Merlin-Trarieux — qui visait à interdire aux cheminots le droit au syndicat. La question de répondre au vote de cette loi par la grève générale se posa et, à ce propos, Guérard, secrétaire du syndicat, et à ce titre délégué au Congrès de l’Union fédérative du centre (parti Allemaniste) prononça un discours catégorique et précis. Il affirma que les cheminots ne reculeraient devant aucun moyen pour défendre la liberté syndicale et qu’ils sauraient, au besoin, rendre la grève effective par des procédés à eux ; il fit allusion à un moyen ingénieux et peu coûteux : « … avec deux sous d’une certaine manière, utilisée à bon escient, déclara-t-il, il nous est possible de mettre une locomotive dans l’impossibilité de fonctionner… »

Cette nette et brutale affirmation, qui ouvrait des horizons imprévus, fit gros tapage et suscita une profonde émotion dans les milieux capitalistes et gouvernementaux qui, déjà, n’envisa-