Page:Procès-verbal de la Commission Municipale du Vieux Paris, 1900.djvu/152

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Le classement prononcé aura peut-être pour effet de le faire dégager.

Les anciens Regards présentent un intérêt considé- rable au point de vue de l'alimentation en eau du Paris de jadis. Ils sont les témoins, solides encore, qui protégeaient ces minuscules ruisselets, captés aux environs, et qui, goutte à goutte, amenaient leurs eaux jusque dans l'intérieur de Paris.

Un travail important sur les anciennes sources pari- siennes, élaboré au sein de la Commission, montre toute l'importance qui s'attache à ces Regards et com- bien leur conservation est intéressante au point de vue du souvenir qu'elle évoque. Celui de la Lanterne, particulièrement, d'une grande importance de construc- tion, présente à la vue une superbe coupole de pierre, édifiée au commencement du xvn° siècle et surmontée d'un lanternon.

Il protège l'entrée de cet aqueduc, dont la puissante ossature a défié le poids des siècles et dont la construc- tion remonte vraisemblablement aux temps lointains de Philippe-Auguste.

Arers la fin de l'année 1898, fut agitée dans l'opinion la question de savoir si les restes des plus illustres parmi ceux qui portèrent le grand nom de Turgot, étaient réellement inhumés à l'hospice des Incurables, dont ils avaient toujours été les protecteurs.

L'identification de ces tombes ayant été décidée par les représentants autorisés de cette famille et par l'Ad- ministratinn municipale, il a paru à celles-ci que seule, la Commission du Vieux Paris, émanation de la Muni- cipalité parisienne, devait être chargée de cette délicate opération, en raison du caractère officiel dont elle est investie et aussi pour le maintien de cette tradition de respect que Paris professe pour ses morts.

Un travail préparatoire d'une documentation com- plète et rigoureuse, qui.peut être considéré comme une page éloquente et scrupuleusement exacte de l'histoire d'une famille qui donna un grand ministre à la France et un prévôt des marchands à Paris, oeuvre d'un membre de la Commission, vint apporter les éléments historiques nécessaires à l'exhumation projetée.

Les présomptions se réalisèrent de point en point et au milieu de la respectueuse attitude des assistants, en présence des représentants de la famille et de ceux de la ville de Paris, quatre tombes furent mises à jour qui contenaient les restes du ministre de Louis XVI, Anne-Robert-Jacques Turgot, de Michel-Etienne Turgot, prévôt des marchands, de l'intendant de Limoges Antoine Turgot et enfin de Jacques Turgot, bienfaiteur de l'hospice des Incurables.

Cette constatation faite, et ce point d'histoire pari- sienne définitivement éelairci, les sépultures rentrèrent dans le silence et le recueillement de cette chapelle des Incurables, qui les abrita si longtemps.

Il a été indiqué, dans les premières pages de cette notice, comment fut retrouvée, â la pointe orientale de la Cité, une partie de l'antique muraille de la Lutèce gallo-romaine. Depuis cette époque (décembre 1897), la Commission du « Vieux Paris » étudiait la possibilité de reprendre sur d'autres points la recherche de la fameuse enceinte qui protégea contre l'envahisse- ment des barbares la bourgade gauloise devenue cité romaine.

Des fouilles furent entreprises à cet effet, en décem- bre 1898, sur deux endroits opposés de la Cité : le premier sur la rive nord, rue de la Colombe; le second sur la rive sud, dans le square de l'Archevêché.

Si la seconde fouille devait donner un résultat négatif, du moins en ce qui concerne la muraille, il n'en fut pas de même de celle qui eut lieu rue de la Colombe, et, aux premiers coups de pioche, le mur d'enceinte apparut, tel qu'il s'était déjà montré un an auparavant à la pointe est de l'île.

Il serait superflu d'insister sur l'importance de ce résultat qui complète heureusement les découvertes précédentes faites sur le même objet : à Saint-Landry en 1829, au Parvis Notre-Dame en 1847 et à l'angle du quai aux Fleurs et de la rue du Cloître Notre-Dame en décembre 1897.

Le vieux sol parisien, on le voit, sait conserver intacts les grands vestiges du passé. Une autre trou- vaille, d'une importance également capitale et d'un intérêt historique de premier ordre, le prouve surabon- damment et montre que les choses que l'on croit sou- vent à jamais disparues, ont quelquefois conservé une existence insoupçonnée.

Il s'agit des substructions d'une des tours de la Bastille, mises à nu par suite des travaux du Métro- politain.

Là, encore, la Commission du « Vieux Paris » put suivre le dégagement complet de cette tour qui fut jadis celle de la Liberté, au temps où la sombre prison muselait la vieille rue Saint-Antoine.

Elle en fit soigneusement le relevé avec la descrip- tion complète et obtint du Conseil municipal sa réédifi- cation sur le quai des Célestins, à quelques mètres de l'endroit où elle fut reconnue.

Ainsi, deux Liberté, l'une idéale, l'autre matérielle, devaient survivre à la forteresse du moyen âge, à ce symbole de la tyrannie, pour parler le langage imagé de ses démolisseurs : la première conquise pâl- ies Parisiens d'alors; la seconde, retrouvée par ceux d'aujourd'hui.

Sans vouloir insister plus longtemps sur le produit plus ou moins fructueux des fouilles exécutées dans Paris, sous le contrôle de la Commission, on doit à la vérité de dire qu'elles furent presque toujours couron- nées de succès :

C'est ainsi qu'un grand nombre de cercueils en plâtre et en pierre des époques gallo-romaine, mérovingienne et du moyen âge furent retrouvés aux abords de Saint- Germain-l'Auxerrois, à la culture-Sainte-Catherine et à l'église Saint-Pierre-de-Montmartre; que la rigole ro- maine qui conduisait, sous l'empereur Julien, les eaux de Rungis au palais des Thermes, fut découverte rue Saint-Jacques, aux coins des rues Malebranche et Royer- Collard; que fut relevée, au bord do la Seine, près de la rue du Petit-Pont et de celle de la Bùcherie, la preuve de l'existence, en cet endroit, d'habitations gauloises, gallo-romaines et mérovingiennes; que les charniers du cimetière de Saint-Paul purent être décrits et reproduits à l'instant où la pioche du démolisseur allait procéder en partie à leur effondrement.

11 convient d'ajouter que la place était toute trouvée