Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 152 —

fois forcé par la conquête, ou inspiré par une tyrannie intérieure, quelquefois volontaire par patriotisme, ne rattachait entre eux les divers membres d’un même état, comme nulle vie commune n’animait les divers membres d’une même famille.

La religion n’était pas un refuge pour l’âme ; elle ne fut jamais un appel à la concorde, un encouragement à la fraternité, une aspiration effective vers quelque chose de plus parfait. On n’était pas d’accord sur l’origine de l’homme, ou l’on ne s’entendait que pour croire et pour propagé une erreur par conséquent, on ne connaissait pas cette loi si belle et si consolante qui, de l’affinité naturelle, amène à l’effusion des âmes. On n’avait que des idées vagues et incomplètes sur la mission de l’homme pendant la vie, et sur ses destinées après la mort ; par conséquent, il n’était pas possible d’être d’accord sur le but à atteindre, et sur les moyens d’y parvenir.

Dans ces conditions il peut y avoir des poètes, des orateurs, des historiens, des philosophes ; il peut surgir de hautes intelligences et se révéler de puissantes imaginations. Des créations merveilleuses peuvent ravir les générations, et inspirer encore de nos jours, cet enthousiasme plein de vénération que commandent des beautés réelles. Il ne peut pas y avoir une littérature ; ou plutôt si elle parvient à se former, par l’action puissante de génies exceptionnels, ou l’heureux accord de circonstances particulières, comme le témoignent la Grèce, Rome, et peut-être l’Égypte, l’Inde et la Chine, il n’en restera pas moins vrai, que la constitution sociale, loin de la porter en germe, semble multiplier d’avance contre elle, les obstacles, et en faire des impossibilités.

Sans doute, ce que nous avons trouvé chez les sauvages de l’Amérique, ce que le voyageur recueille sur les plateaux et le long des fleuves de l’Afrique, ce que le nord de l’Europe et de l’Asie a proposé à une admira-