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Cinquante ans après, en 1319, par une requête datée de Roquecourbe, et adressée au roi Philippe-le-Long, Éléonore de Montfort supplie ce prince de recevoir à hommage le comte de Vendôme son fils.

Il existe dans les archives de Roquecourbe une pièce qui constate la sollicitude d’Éléonore pour les habitants de cette ville. Elle est datée de 1327. C’est un grand parchemin écrit en latin. Il renferme, entre autres privilèges, celui-qui fut accordé le 21 juillet de cette année aux habitants de Roquecourbe, par Éléonore de Montfort, comtesse de Vendôme et de Castres : De ne contribuer à aucun frais, soit de pierre, soit de bois, pour le rétablissement du pont de Roquecourbe.

À l’histoire d’Éléonore, se rattache une chronique qui attribue dans le pays la construction du pont de Roquecourbe à une grande princesse habitant anciennement le château. Cette noble dame, désolée de la perle de son fils qui s’était noyé en passant, dans un bac, la rivière débordée, fit construire un pont entre la ville et le rocher sur lequel on voit les ruines du vieux manoir féodal.

Il ne manque à cette anecdote pour acquérir l’autorité d’un fait authentique, que le nom des personnages, la date de l’événement, et la preuve de la mort par submersion du fils de la châtelaine. Sauf cette dernière particularité, Roquecourbe possède par l’existence de son pont, la preuve historique d’un fait fondé sur une tradition de plus de cinq cents ans.

Au reste, le château de Roquecourbe semble avoir été destiné à abriter de grandes infortunes.

En 1424, il fut témoin d’un événement suivi d’un grand deuil, qui dut laisser dans le pays de douloureuses impressions. Une autre femme du même nom et de haute lignée, Éléonore de Bourbon, fille unique de Jacques de Bourbon et de Béatrix de Navarre, se mariait dans son château de Roquecourbe, à Bernard d’Armagnac qui fut comte de Castres. De ce mariage naquit l’infortuné Jean d’Armagnac, duc de Nemours, qui périt sur l’échafaud, victime autant de ses propres imprudences, de ses fautes et de son ingratitude, que de la politique ombrageuse et de la volonté inflexible de Louis XI.