Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/112

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cord entre elles, calculant leurs risques et leurs primes de manière à ce que les pertes soient couvertes au moins deux fois par les bénéfices, doublent et triplent chaque année leur capital.

Comment donc se fait-il que l’assurance mutuelle n’ait pas, depuis longtemps, remplacé toutes les autres ? Ah ! c’est qu’il est bien peu de particuliers qui veuillent s’occuper des choses qui intéressent tout le monde, mais ne rapportent rien à personne ; c’est que le gouvernement, qui pourrait prendre cette initiative, s’y refuse, comme si la chose ne le regardait point, parce que, dit-il, c’est affaire d’économie politique, non de Gouvernement ; disons mieux, parce que ce serait porter atteinte à des compagnies de parasites, gros messieurs, vivant largement du tribut que leur payent les assurés ; c’est enfin que les essais qui ont été faits, soit en dehors de la sanction de l’État et sur une trop petite échelle, de l’assurance mutuelle, soit par l’État lui-même, mais dans des vues de sinécurisme, ont fini par rebuter les plus zélés, si bien que l’institution est restée en projet, L’assurance mutuelle, abandonnée par l’autorité publique, à qui il appartenait de la prendre en main, n’est encore qu’une idée.


« Lorsque l’esprit d’initiative et le sentiment de collectivité qui sommeillent en France auront pris leur essor, l’assurance deviendra un contrat entre les citoyens, une association dont les bénéfices profiteront à tous les assurés et non à quelques capitalistes, bénéfices qui se traduiront alors en une réduction de prime à payer. Cette idée s’est déjà produite, dans le public et dans les assemblées délibérantes, sous formes d’assurances par l’État[1]. » (Ibid.)

  1. Il y a quelques années, un système complet d’assurances mutuelles fut organisé par M. Perron, chef de division au ministère d’État, et présenté au public sous la protection du Gouvernement. Grande fut la rumeur parmi les Compagnies. Je ne sais ce qui arriva, si le Gouvernement retira sa protection, si l’administration nouvelle manqua d’habileté, ou si ce fut un effet de l’intrigue ces Compagnies rivales : toujours est-il que le nouveau système fut abandonné, les opérations liquidées, et qu’il n’en est plus question.