Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/263

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gations ; je ne les réfuterai pas, je n’y contredis point. On ne contredit pas ce qui est de soi contradictoire. Ici les faits, ainsi que je l’observais tout à l’heure, le droit nouveau, les textes constitutionnels, les sous-entendus de l’opinion, tout proteste du pour et du contre, et fait aux adversaires du pouvoir qui lui ont prêté serment, une part de raison : comment pourrais-je donc les réfuter ?

Mais c’est justement cette situation ambiguë que je dénonce ; c’est cette contradiction immorale, dont je n’accuse personne d’avoir été l’inventeur puisqu’elle résulte de nos révolutions, c’est cette hypocrisie légale, que je reproche à tous ces serments prêtés d’une main si légère, par des hommes qui y regarderaient probablement à deux fois, s’ils n’étaient d’avance convaincus de l’insignifiance de leur promesse. Ce que je reproche, dis-je, à tous ces serments, c’est d’être prêtés sciemment en vain, malgré la défense du Décalogue : Non assumes nomen Dei tui in vanum ; c’est de ne contenir qu’une promesse négative, une obligation passive, qui laisse la porte ouverte au dénigrement, à la dénonciation, à l’attaque ; de n’offrir aucune garantie à l’autorité et de profiter seulement aux ambitieux qui, parfaitement convaincus de leur inefficacité, ne craignent pas de s’en charger. Ce que je reproche à ces serments, c’est d’avoir perverti les consciences ; c’est que chacun, dans le monde politique, puisse dire, avec une sérénité d’âme que ne connurent jamais les Jésuites : J’ai prêté serment, et je ne le violerai pas. Mais je ne garantis rien, je ne réponds de rien ; pour satisfaire à ma promesse, il suffit que je me tienne coi. Que le Pouvoir se défende, c’est