Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/353

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Quoi ! l’on rendrait les finances à M. Garnier-Pagès, l’instruction publique à M. Carnot, la justice à M. Marie, l’intérieur à M. Jules Favre ! Nous serions des saints de bois, des républicains de carton, qu’à la vue de ces assermentés nous ne pourrions nous taire ; à défaut de nos plumes, les pavés se lèveraient. Bonnes gens, qui depuis trois quarts de siècle vous laissez empaumer avec ces libertés de comédie, comprenez-le donc une fois : ce n’est point avec cette avocasserie, avec ce patelinage jeté comme un graillon sur une centralisation énorme, doublée d’une anarchie mercantile incurable, cuirassée d’une féodalité financière qui domine l’État lui-même, que vous arriverez à la liberté et à l’ordre, pas plus qu’à la confiance. Le seul fait de l’indivision systématique de la souveraineté en France, combiné avec votre insolidarité économique, vous est un gage assuré que les jours de calme et d’abondance ne reviendront plus.

Que le Gouvernement, que la bourgeoisie connaissent la vérité de leur situation. À la démoralisation politique manifestée par le peu d’importance attaché au serment, s’ajoutent, comme corollaires, l’incompatibilité de l’unitarisme et de toutes les libertés, l’impossibilité d’un budget normal, le désespoir de la félicité publique et du progrès. Tout devient alors conspiration contre le Gouvernement établi, tout lui est hostile : conférences littéraires, scientifiques ou morales, lectures poétiques, séances académiques, discours d’inauguration, cours publics, sermons de l’avent et du carême, spectacles, banquets, anniversaires, sociétés de bienfaisance ; il faut qu’il empêche tout ou boive la ciguë.