Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/44

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l’Empire, qui viennent d’être déçus à leur tour par le vote populaire d’une façon si cruelle. Ce ne sont pas les partisans de la monarchie constitutionnelle et bourgeoise, incompatible avec la grande institution démocratique, et à qui le peuple vient de déclarer nettement, par ses choix, qu’il ne veut pas revenir à l’Orléanisme. Ce n’est pas l’Opposition, enfin, qui a eu tant de peine à faire renoncer les ouvriers à leurs candidatures. On a si peu de confiance, dans le monde politique, au suffrage universel ; il inspire de telles inquiétudes, que déjà, de différents côtés, il a été proposé de le modifier en le ramenant au système échelonné du premier Empire. Seule la multitude des villes et des campagnes croit à la grande conquête de 1848 ; elle y tient mordicùs : on commence à deviner pourquoi. De sorte que, sur la base même de notre ordre politique, il y a divergence complète, scission profonde, entre le Pouvoir, l’Opposition, les classes élevées, d’une part, et les masses travailleuses et ignorantes de l’autre : telle est la vérité, qu’on n’avoue pas, sur notre époque.

Supposez quelque Tacite résumant dans l’avenir la situation de notre pays pour l’an 1865-64, voici en quels termes il s’exprimerait :


Extrait des Annales du peuple français, mars 1864. « Des élections de cette année et de celles de l’année précédente il résulte : 1o Que le gouvernement est par sa nature incompatible avec le tempérament, les aspirations et les mœurs de la bourgeoisie ; 2o Que le peuple, sur lequel il pouvait s’appuyer, semble à son tour vouloir se retirer de lui, d’abord dans les villes, mais sans se rallier à la bourgeoisie, pendant que dans les campagnes il continue de voter avec le Pouvoir, mais dans un sentiment de réforme économique.