Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/113

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ces idées, disons mieux, de ces pouvoirs et de leur subordination.

Le droit, en latin jus, est, d’après la définition des auteurs, ce qui est propre ou qui a rapport à chacun, jus est suum cuique tribuere. C’est, en chaque individu pris comme centre d’action, sujet d’inhérence indépendant et souverain, ce qui constitue l’ensemble de sa dignité, soit comme faculté, attribution, prérogative, convenance ; soit comme moyen d’action et de jouissance, apanage, propriété.

C’est ce que rend sensible la série des vocables formés du même radical : jugis, jugum, jungere, juger, juvare, jubere, contracté de jus-habere, juxtà, etc. Dans tous ces mots, le thème ju exprime adéquateté, connexité, continuité, inhérence, juxtà-position, congruence, justesse. Il est absurde de dériver jus, de Jous, Jovis, le même que Ζεὺς ou dies, diù, djoù comme si le droit était la pensée de Jupiter (pourquoi pas de Junon ?), plus absurde encore de faire venir Jovis de Jéhovah.

En français, de même qu’en latin, on dit qu’une chose est juste, qu’elle nous va, qu’elle nous joint, quand elle s’adapte avec précision à une autre pour laquelle elle est faite. Et tel me paraît être le sens primitif de l’allemand recht, traduit plus tard par directum, duquel nous avons fait droit. Recht est ce qui va droit, rectà, comme dit Molière dans Pourceaugnac :

Votre fait
Est clair et net,
Et tout le droit
Conclut tout droit.

De là notre mot droiture, qui cadre si bien avec allures, tournures et mesures, traductions littérales des mots par lesquels le grec et le latin expriment les mœurs. C’est abuser de la métaphore que de prendre texte de