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ration de leurs personnes, c’est par souci de notre délicatesse.

C’est tout autre chose vis-à-vis de l’homme, blanc, jaune, rouge ou noir. Pour peu que je prenne avec lui les façons que je me permets avec les brutes, je l’offense, et, ce qui est plus extraordinaire, je m’offense moi-même en l’offensant.

Si je tiens à mon prochain un discours faux je manque à sa dignité, je le trompe ; de plus je manque à la mienne, je mens. Double méfait : par la nature de la Justice, le crime est toujours double.

Si je le fais esclave, que je lui prenne sa femme, son enfant, son bien, si je le tue, je suis tyran, voleur, assassin, adultère. Je sens que je me suis mis au-dessous de l’humanité qui est en lui et en moi, ce qui veut dire que je me reconnais digne de mort.

Que signifie tout cela, si ce n’est qu’entre l’homme et l’homme, outre le sentiment de bienveillance et de fraternité il en est un autre de considération et de respect, qui sort du cercle ordinaire de la sympathie naturelle à tous les êtres vivants, et ne se trouve plus entre l’homme et les animaux ; en autres termes, qu’entre l’homme et la bête, s’il y a lieu quelquefois à affection, il n’existe rien de ce que nous appelons Justice, et que c’est là un des traits qui distinguent tranchément notre espèce, comme la parole, la poésie, la dialectique, l’art ?

XXXIII

La Justice expliquée dans sa cause, séparée de la religion, distinguée de l’amour, reste à voir comment elle intervient pour la constitution de la société.

La Révolution seule a conçu et défini le Contrat social.

À ce mot on se récrie : L’association est spontanée ; il n’y a jamais eu de contrat social. — Non, pas plus qu’il