Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/225

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vice est la seule cause de l’inégalité parmi les hommes.

« C’est une vérité certaine, dit-il, que la différence des conditions est une suite nécessaire du péché originel, et que souvent la qualité, les richesses, l’élévation, tirent leur origine de l’injustice et de l’ambition de ceux à qui nos aïeux doivent leur naissance… La force, ou la loi des brutes, celle qui a déféré au lion l’empire des animaux, est devenue la maîtresse des hommes. » (Traité de morale, xiv, 1, 4, 6.)

« Cinq ou six pendards, disait Domat, un des dévots de Port-Royal, cité par M. Cousin, partagent la meilleure partie du monde et la plus riche ! c’en est assez pour nous faire juger quel bien c’est devant Dieu que la richesse. »

Ainsi la réparation promise se trouva transportée du monde visible au monde transcendantal ; les Évangiles, rédigés sous l’inspiration des évêques, eurent pour objet d’inculquer, avec l’obéissance au pouvoir ecclésiastique, cette doctrine de hasard et de résignation, et le christianisme fut, comme aurait dit le peuple de 1848, escamoté.

Ne vous inquiétez plus à présent de la véhémence des sermonnaires. Comme l’Évangile, ils déclameront, ils fulmineront contre les riches, mais en concluant toujours, au nom de la prévarication, de la pénitence, de la grâce et du royaume céleste, contre les pauvres.

VIII

Certes, ce ne furent pas des hommes de peu de foi que ceux qui digérèrent une pareille idée.

Que la possession des biens terrestres fût pour le chrétien un intérêt d’ordre inférieur, sans comparaison avec l’amour de Dieu, les devoirs de piété et les espérances d’outre-tombe, cela ne tirait pas à conséquence, et ce n’est pas non plus la question.

Mais si méprisables que fussent ces biens, encore fallait-il s’occuper de leur distribution ; et l’importance de